MÉLISSA ALVES : « Je suis convaincue que la direction dans laquelle je vais est la bonne »

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Les douleurs, j’ai l’habitude … Je me suis fait un peu mal à la hanche sur un mauvais appui. Ce n’était pas quelque chose qui allait me forcer à abandonner, mais on a la chance d’avoir cette règle qui nous permet de prendre 3 minutes en cas de blessure auto-infligée. J’avais juste besoin de mettre un petit coup de froid (sic), et c’était reparti. Même si le jeu était mal embarqué, mon entraîneur m’a dit de ne rien lâcher, et on sait qu’en squash tout peut aller très vite. Et on ne va pas se mentir, sans doute que cette interruption a déstabilisé mon adversaire.

Comme lors de tes deux tours précédents, tu es tombée sur un jeune joueuse qui t’a bousculée en début de match. Comment expliques-tu ces entames un peu compliquées ?

L’explication vient plutôt de leur niveau à cet instant. Il n’y a plus de match facile, les joueuses jouent à un niveau élevé de plus en plus jeunes et leur classement ne veut pas dire grand chose. Dans ce genre de match, elles jouent totalement libérées et prennent beaucoup de risques dès l’entame, alors que la favorite a un peu plus de pression. D’un autre côté, je sais qu’il faut parfois savoir laisser passer l’orage, et qu’elles ne vont pas rentrer 33 points gagnants (rires) … Si je fais durer les échanges, elles vont finir par baisser de pied physiquement et faire plus de fautes.

« C’est toujours bon signe de gagner sans jouer à son meilleur niveau »

Pour s’imposer à Monte-Carlo, Mélissa Alves (à gauche) a dû repousser les assauts de plusieurs jeunes aux dents longues, notamment la prometteuse Égyptienne Nour Heikal 📷 Arnaud Baldoni

Ton entraîneur Christophe Carrouget disait que tu n’avais pas produit ton meilleur squash tout au long de la semaine, mais que tu t’en était sortie grâce à ton attitude et ta combativité.

Oui, et c’est toujours bon signe de gagner sans jouer à son meilleur niveau ! Cette semaine, j’ai couru et j’ai couvert le terrain (rires) alors que ce n’est pas mon jeu naturel.

Avant le tournoi, tu disais avoir choisi Monaco plutôt que Hong Kong pour enchaîner les matches et tenter de regagner un titre. C’est chose faite !

N’oublie pas que j’avais gagné l’open de Guyane il y a quelques semaines, en battant Mathieu Benoit en finale (rires). Plus sérieusement, mon objectif en venant ici était clairement d’aller au bout, on s’entraîne pour gagner des titres. C’est encore mieux de le faire devant le public monégasque, que je remercie de ses encouragements, le DTN Éric Silvestri, qui avait fait le déplacement, et mon entraîneur Christophe Carrouget. D’ailleurs dans ma demi-finale contre Nour Heikal, quand je suis mené 1-0 et 10-6, je l’ai regardé et je me suis rappelé qu’il avait fait la route exprès depuis Clermont-Ferrand, et que je n’avais pas le droit de perdre (rires). Ses conseils et ses encouragements ont été précieux, tout comme ceux de Philippe Signoret lors des matches précédents.

Tu rejoins de très grandes joueuses au palmarès du Monte-Carlo Classic, est-ce que c’est important pour toi ?

Absolument pas ! Je plaisante, ça fait très plaisir, surtout d’être la deuxième Française à le gagner après Camille Serme. J’en profite pour souligner que depuis qu’elle a mis un terme à sa carrière, Camille m’apporte un soutien précieux, que ce soit par des messages d’encouragement ou une analyse de mes matches. Elle les regarde tous, en tous cas c’est ce qu’elle me dit (rires) … Je remercie aussi les organisateurs de leur accueil toujours chaleureux. C’est un tournoi reputé sur le circuit, qui met le squash féminin en lumière. En plus, il fait beau et le cadre est sympa !

Mélissa Alves a passé une superbe semaine à Monaco et a loué la qualité de l’organisation 📷 Alain Pestoni

Revenons sur ton début de saison, es-tu d’accord si je te dis qu’il a été en demi-teinte ?

Totalement, il y a eu du bon et du moins bon. L’open de France, c’est comme si je n’y avais pas été (NDLR : elle s’était inclinée d’entrée à Nantes face à la jeune Égyptienne Fayrouz Aboelkheir) … J’ai tout de même fait un 1/8ème en Platinum, et certaines de mes défaites sont intervenues contre des joueuses du top 10, par exemple Amanda Sobhy et Nour El Tayeb.

Il y a quelques jours en Malaisie, tu es passée tout près d’un succès référence face à Tesni Evans (Mélissa s’était inclinée 12-10 au cinquième jeu).

J’ai revu le match – en laissant passer un peu de temps, je ne suis pas maso (rires) … Clairement j’aurais pu voire dû gagner. Même s’il s’agit d’une défaite, je crois qu’elle va constituer un déclic car ça me fait prendre conscience que je suis capable de battre la plupart des joueuses sur le circuit. Je me sens bien physiquement en ce moment, et je joue bien à l’entraînement. Je suis contente de l’évolution de mon jeu. Je suis convaincue que la direction dans laquelle je vais est la bonne et que ça va se traduire rapidement par des résultats.

« Même s’il s’agit d’une défaite, je pense que mon match contre Tesni Evans en Malaisie va constituer un déclic »

Quels sont tes objectifs à moyen terme ?

Il y a un an, j’étais sur une belle dynamique mais ma blessure au pied a été un vrai coup d’arrêt, surtout la rechute. J’ai mis pas mal de temps à reprendre confiance dans mon corps. J’aimerais réintégrer le top 20 le plus rapidement possible, et ensuite pourquoi pas le top 10 ? Si on s’entraîne aussi dur, c’est pour se fixer des objectifs élevés. Le classement est désormais hebdomadaire et on a davantage d’opportunités de monter. De plus, il y a une tournée Américaine très chargée début 2023 et beaucoup de points à prendre … D’un autre côté, il ne faut pas en faire trop et c’est la raison pour laquelle je ferai normalement ma rentrée au Tournament of Champions à la mi-janvier, avec un gros bloc d’entraînement auparavant.

Les fêtes de fin d’année, tu les passeras en Égypte qui est depuis peu ton pays de résidence. Peux-tu nous expliquer ce choix ?

Je tiens à souligner que Christophe Carrouget reste mon coach et que j’ai une confiance totale en lui. Cependant, il a de nombreuses missions à Clermont-Ferrand et ne pouvait pas me consacrer 100 % de son temps, ce que je comprends très bien. Je cherchais donc un nouvel endroit pour m’entraîner, et le gros avantage de l’Égypte est que j’ai l’opportunité de taper la balle avec de nombreuses joueuses au style très différent. Je m’entraîne régulièrement avec Nada Abbas, Hana Moataz, Salma Hany, de temps en temps avec Hania El Hammamy et même Raneem El Welily, je peux vous dire qu’elle joue encore pas trop mal (NDLR : Mélissa est très proche de l’ancienne championne du monde et n°1 mondiale) … J’étais déjà restée en Égypte avant ou après des tournois, et c’est elle qui m’a fait découvrir son pays.

Depuis quelques mois, Mélissa est basée en Égypte et travaille aux côtés d’Amr Khalifa 📷 PSA World Tour

Ton entraîneur est Amr Khalifa, ancien champion du monde junior mais qu’on ne connaît pas trop dans ce rôle.

Il s’occupe notamment de Youssef Soliman et Sana Ibrahim. J’étais fan de son jeu, et Raneem ne m’en a dit que du bien. Il est très calme, tout le contraire de moi (rires). En plus des séances physiques et individuelles avec Amr, j’ai plusieurs matches d’entraînement par semaine, et il assiste à la plupart d’entre eux. Avoir quelqu’un qui est en mesure de vous consacrer beaucoup de temps, ça change pas mal de choses. La façon de travailler en Égypte me correspond et c’est ce dont j’avais besoin à ce stade de ma carrière.

Puisqu’on parle d’Égypte, c’est au Caire que débute le championnat du monde par équipe ce weekend.

C’est le gros objectif de cette fin d’année 2022, et on a hâte d’y être. On a un groupe qui a déjà vécu des choses fortes ensemble, et je suppose que c’est pour ça que Philippe a sélectionné Camille et Coline Aumard (NDLR : les anciennes numéros 1 et 2 françaises ont mis fin à leur carrière professionnelle en fin de saison dernière). C’est un avantage de déjà se connaître, on adore jouer les unes pour les autres. Le titre de championnes d’Europe en 2019, on ne l’oubliera jamais et on en reparle très souvent.

« On n’oubliera jamais le titre de championnes d’Europe en 2019 »

Pour la première fois, tu seras la numéro 1 de l’équipe de France.

Oui, et je me sens prête à assumer ce rôle, je vais avoir de bons matches et il faudra en gagner le plus possible. D’un autre côté, Camille sera une adversaire difficile en n°2 pour pas mal de joueuses. C’est un peu comme si moi je devais jouer contre Raneem ou Laura Massaro, ce sont des filles qui ont une énorme expérience et un QI squash très élevé.

Pour Mélissa Alves et les Bleues, le titre de championnes d’Europe décroché en 2019 reste un immense souvenir 📷 SquashSite

Quelles ambitions vous êtes-vous fixées pour ce championnat du monde ?

L’Égypte est évidemment intouchable sur le papier, et les États-Unis ont également un groupe très solide. Néanmoins, on sait que la pression dans une compétition par équipe n’est pas la même que sur un tournoi individuel. De plus, le calendrier est surchargé depuis le début de la saison et il y a pas mal de joueuses qui ont des pépins physiques. Si nos « mamies » sont à leur meilleur niveau et que les planètes s’alignent le jour J, tout est possible et je pense qu’on est capables d’aller chercher un podium.